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Jour 30 – 33 : la fin d’un voyage scientifique et humain

19-22 mai 2022 | En route vers l’île de La Réunion

Alycia Valvandrin, Eugénie Dufour, Guerric Barrière, Lucas Zaccagnini & Salomé Pellé

Ca y est, la campagne RESILIENCE sur le Marion Dufresne touche à sa fin ! Comme nous le rapportions dans notre dernier article du Blog, la dernière CTD a été mis à l’eau le 16 mai, avec une bouteille de champagne accrochée dessus pour marquer la fin de la dernière mission océanographique de Jean-François Ternon, le chef scientifique de cette mission. Cet événement symbolique, celebré avec un petit verre à la main (avec modération bien sûr !), a été un moment de joie et partage, marqué aussi par les retrouvailles de nos compagnons, enfin libérés après 11 jours de confinement dans leurs cabines à cause du COVID.

Maintenant que la science est terminée, il est temps de plier bagage et de préparer notre arrivée à La Réunion, qui apporte son lot d’émotions. Même s’il n’y a pas de vacation scientifique, ces derniers jours à bord restent riches en activités. Les séminaires sont nombreux, afin de donner l’opportunité à tous ceux qui le souhaitent de partager leurs travaux. Alexandre Epinoux et Felipe Artigas nous ont donné une conférence commune sur le suivi automatisé du phytoplancton, tandis que Sara Tembé et Lucas Zaccagnini nous ont présenté soit leur sujet de thèse, soit leur contribution à une ONG de conservation. Leurs présentations étaient similaires car leur objectif était le même : mieux gérer les pêcheries et leurs impacts sur l’écosystème, aider les décideurs dans leurs choix, et préserver l’écosystème des différents organismes, que ce soit la crevette du Mozambique pour Sara ou les requins de Bretagne pour Lucas. Claire Lo Monaco a participé aux séminaires en expliquant les différentes variations des concentrations de carbone anthropique dans l’Océan, qui stocke 30% du carbone total émis par les humains (de quoi réfléchir…) ! Amanda Lombard a également terminé sa deuxième conférence scientifique en proposant un petit défi : créer la meilleure aire marine protégée, respectant les objectifs de protection tout en étant la moins coûteuse. Félicitations à Angèle, Illona et Nathan (de l’équipe MVP) pour avoir créé l’aire marine protégée la plus efficace possible, encore mieux que ce que le modèle d’Amanda avait prévu ! Ils ont mérité leur tablette de chocolat !

Entre temps, l’équipage organise plusieurs visites des machines et des explications sur leur fonctionnement. En effet, ces zones du bateau nous sont habituellement inaccessibles pour des raisons de sécurité. Du fonctionnement du moteur et des hélices à la façon dont l’eau souillée est traitée, nous avons pu avoir une vision plus globale du fonctionnement du Marion Dufresne, et aussi prendre conscience de toutes les personnes qui travaillent sous nos pieds, même lorsque nous dormons !

Maintenant que les prélevements scientifiques sont terminés, les étudiants de l’Université flottante ont également l’occasion de découvrir le mystérieux laboratoire des métaux traces, surnommé « la bulle ». Pourquoi ce nom ? Les métaux traces sont présents partout dans notre environnement et peuvent se déposer sur nos vêtements, sur notre peau, ou même sur nos cheveux. C’est pourquoi les scientifiques doivent recréer un lieu exempt de toutes particules (ou du moins faire de leur mieux…) en portant des combinaisons spéciales et en nettoyant le laboratoire au maximum afin de ne pas contaminer leurs échantillons. En effet, ces métaux particuliers doivent leur nom à leur concentration ultra-microscopique dans l’océan (pour être exacts entre les pico (10-12) et les nano (10-9) grammes de métal par litre d’eau de mer ! Vous pouvez découvrir plus d’informations sur ces éléments dans le séminaire de Ryan Cloete). Les échantillons sont ainsi collectés grâce au « geoFISH » déployé loin du bateau afin de ne pas récupérer les métaux traces présents au niveau du bateau et ensuite analysés dans la bulle. Au cours de leur visite de la bulle, les étudiants ont pu s’essayer au filtrage et à la récupération d’échantillons d’eau de mer de la même manière que l’équipe l’a fait pendant la campagne RESILIENCE et ainsi percer les sécrets de cette équipe, autrefois cachée derrière les parois en plastique.

Autre activité importante lors de notre dernière journée de cette campagne : le timbrage du courrier ! La philatélie sur le Marion Dufresne est une tradition et consiste à affranchir toutes les enveloppes et lettres qui seront envoyées une fois de retour sur terre, ou pas ! En effet, certaines personnes préfèrent garder ces timbres en souvenir dans un carnet ou sur d’autres supports, sachant que ces timbres sont très appréciés des philatélistes (collectionneurs de timbres) !

La dernière conférence organisée à bord du Marion était une présentation des principaux travaux effectués pendant la campagne par chaque équipes : l’occasion de faire un premier bilan de la campagne RESILIENCE. Cette campagne ne s’est pas déroulée sans heurts et nous avons compris que la science était pleine d’événements inattendus. Voici un résumé de certains événements imprévus : de multiples dysfonctionnements du système de treuil de la CTD nécessitant des réparations, le scanfish a été déployé pour remplacer le MVP mais s’est fissuré après quelques jours et finalement le câble du MVP s’est rompu, et l’instrument se trouve maintenant au fond du canal du Mozambique. Enfin, des cas de COVID-19 ont été détecté à bord et se sont rapidement transformés en un cluster. Malgré ces événements malheureux, la plupart des équipes reviennent à terre avec d’excellentes données, grâce à la grande capacité d’adaptation de l’équipe embarquée, marins comme scientifiques (à ce sujet vous pouvez trouver plus d’informations sur l’adaptabilité de nos équipes dans l’article d’Eugénie « Retrospective of the engineering-research alliance on a scientific cruise« ).

L'équipe scientifique en train de ranger et émballer le matériel. ©Salomé Pellé

Pour donner une idée, la CTD a été déployée 51 fois, le phytonet, la fluroprobe et le multinet ont été déployés 36 fois et 12 chaluts mésopélagiques ont été effectués. Les étudiants de l’UF ont aidé les scientifiques pendant 950 heures, ce qui a été très apprécié !

Mais le travail est loin d’être terminé, tous les équipements vont être déchargés, leur transport organisé, et tous les échantillons récupérés. De retour dans leurs laboratoires, toutes les équipes vont analyser et exploiter toutes les données. Et il y a BEAUCOUP de données : pour l’équipe phytoplancton, par exemple, 180 filtres de chlorophylle totale et 666 filtres de chlorophylle fractionnée ont été collectés durant cette campagne et devront être analysés. Nous leur souhaitons bonne chance pour tous ces résultats, mais c’est à cela que servent les stagiaires ! Nous espérons que cette campagne scientifique permettra de mieux décrire et comprendre les structures sub-mésoéchelles et les activités biologiques qui se déroulent dans cette région.

L’arrivée dans le port de la Réunion en ce dimanche après-midi 22 mai marque véritablement la fin de la campagne océanographique RESILIENCE. Après un test antigénique effectué par l’ensemble de l’équipage dimanche soir, c’est l’esprit clair que nous pouvons tous débarquer à La Réunion. Les premières personnes sont parties quelques minutes après l’amarrage du navire, les autres profiteront encore d’une nuit à bord du navire et partiront demain matin, comme c’est le cas pour les étudiants de l’UF. Nous commençons tout juste à réaliser que cette incroyable expérience d’un mois touche à sa fin, et que nous allons tous retourner à nos vies dans quelques jours. Les petits mots échangés, les câlins et les larmes étaient à l’ordre du jour ce soir, ce qui nous permet aussi de voir à quel point des liens forts se sont créés pendant cette campagne. Tout le matériel scientifique a été emballé pour être transféré hors du bateau, les valises se remplissent et les derniers souvenirs se forment dans nos têtes. Nous remercions chaleureusement tous les participants de la campagne RESILIENCE et tous les membres de l’équipage pour leur accueil, leur professionnalisme, leur gentillesse, et pour les parties de fléchettes bien sûr ! Cette expérience scientifique et humaine restera gravée dans nos mémoires !

Pour fêter une dernière fois ensemble cet incroyable voyage, nous avons eu l’occasion de mettre pied à terre et de nous retrouver dans un bar proche du lieu d’amarrage, dans une ambiance agréable non sans le début d’une certaine nostalgie. Même si nos chemins se séparent, cette expérience restera à jamais gravée dans nos mémoires et ce qu’elle nous a apporté va bien au-delà de l’aspect scientifique. Nous espérons également avoir pu vous faire participer un peu à notre voyage et que ce journal de bord aura été aussi agréable à lire qu’à réaliser. Nous vous laissons en vous disant que finalement, rien n’est impossible. Merci davoir été avec nous !


Tout le monde réuni sur le pont supérieur pour un dernier au revoir ! ©Damian Mooney & Jan Hendrick De Jongh

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